Topic 7190357

DH//357Re://T7190 [Casio/Dora/Opera/Ludv/Opus - Andrea Chénier] post. 18-07-14 19:20:28

 

Auguste Couder - Ouverture des États Généraux de la Révolution, 5 mai 1789

ANDREA CHÉNIER

 

357Re://T7190 [Casio/Dora/Opera/Ludv/Opus - Andrea Chénier] post. 18-07-14 19:20:28

Madeleine de Coigny raconte la mort de sa mère: celle-ci, d’abord présentée au premier acte comme une rombière qui donne des soirées décadentes, se trouve à sauver la vie de sa fille: Madeleine peut s’enfuir, en évitant l’incendie du château, et en croisant sur sa route un ange qui se nomme l’Amour:

Il faut que tu vives! Je suis la vie !

Le ciel est dans mes yeux!

Je marcherai à tes côtés

Je supporterai tes malheurs avec toi.

Souris et espère! Je suis l’Amour!

Ce qui m'entoure n'est-il que sang et boue?

Je suis le divin! Je suis l’oubli!

Je suis le dieu qui vient du paradis sur terre

pour faire de la terre un paradis.

357Re://T7190 [Casio/Dora/Opera/Ludv/Opus - Andrea Chénier] post. 18-07-14 19:23:52

J’ai longtemps pensé qu’Andrea Chénier était un opéra de second ordre, qui devait beaucoup aux interprètes qui ont immortalisé ses principaux airs. Franco Corelli nous a laissé un incomparable Come un bel di di maggio, que chante le poète sur un vrai poème d’André Chénier au quatrième acte, et José Carreras est sublime dans l’air du début de l’opéra: Un di all’azzuro spazio. Or c’est à la lumière de cet extrait, qui a servi de rampe de lancement à plusieurs grands ténors (Domingo, del Monaco, et aujourd’hui Jonas Kaufmann qui en fait une de ses meilleures prises de guerre avec Otello) que j’ai  révisé mon jugement sur cet opéra: il est d’une écriture magnifique, du début à la fin. L’œuvre s’accorde dans un ensemble d’une très grande solidité, jamais éprouvée par les nombreuses digressions dont l’histoire s’accapare (un double récit politique et amoureux). Un opéra incontournable de la période du vérisme, qui échappe à ses pièges, et qui réussit à rendre un amour passionné entre André Chénier et Madeleine de Coigny alors que tout les divise au commencement.

357Re://T7190 [Casio/Dora/Opera/Ludv/Opus - Andrea Chénier] post. 18-07-14 19:26:49

La scène finale est extraordinaire. Le cri d’amour des deux amants (Vive la mort, ensemble!) qui se dirigent vers la guillotine est une des fins les plus victorieuses, musicalement et théâtralement, et des plus intérieurement heureuses qu’on ait vue à l’opéra. Aussi, d’un point de vue psychologique, cela laisse présager le mysticisme exalté des Carmélites de Poulenc.

357Re://T7190 [Casio/Dora/Opera/Ludv/Opus - Andrea Chénier] post. 18-07-14 19:29:12

Ce grand air au début de l’opéra, appelé «Improvisation», est une mise en abîme de l’écriture même de tout l’opéra. Giordano y place ses principaux motifs amoureux, mais un fait unique surprend dans la partition: elle est sans armure du début à la fin, comme si cette écriture procédait elle-même d’une improvisation. Pourtant, nous sommes en territoire tonal, et très rarement en do majeur, seule tonalité qui dispense la portée d’une déclinaison de dièses ou de bémols. L’œuvre n’obéit pas, non plus, à aucune tonalité de prédilection. Elle commence en la, finit en sol, et fait état, comme toutes les œuvres véristes, d’innombrables modulations. J’ai longtemps cherché à savoir pourquoi Giordano a choisi ce parti pris pour le moins laborieux, et la réponse ne m’est jamais venue. Son opéra le plus prisé après Andrea Chénier, Fedora, est écrit de façon plus conventionnelle théoriquement, bien que dans toutes les œuvres de Giordano nous assistons à des audaces mélodiques qui confinent à l’étrange: ici, par exemple, la dernière note de la gavotte qui conclut le premier acte surprend par son absence de tonique. Mais j’interprète cet accord en si mineur (au lieu du ré majeur attendu) comme un débouchement sur le drame: ces amusements de la bourgeoisie tirent à leur fin.

357Re://T7190 [Casio/Dora/Opera/Ludv/Opus - Andrea Chénier] post. 18-07-14 19:31:50

Au plan des comparaisons, je trouve que cet opéra sur trame historique a beaucoup de points communs avec Tosca de Puccini. Dans les deux cas les ténors sont mis en valeur par deux grands airs, un sur l’amour dès leur entrée en scène à l'acte I, et un adieu à la vie dans leur prison juste avant leur exécution. Il y a, au centre, une aria pour la soprano qui exprime des sentiments de piété par rapport à sa destinée. Et puis il y a ce triangle amoureux à saveur politique dans un climat social divisé.

 

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Auguste Couder - Ouverture des États Généraux de la Révolution, 5 mai 1789

ANDREA CHÉNIER

 

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Madeleine de Coigny raconte la mort de sa mère: celle-ci, d’abord présentée au premier acte comme une rombière qui donne des soirées décadentes, se trouve à sauver la vie de sa fille: Madeleine peut s’enfuir, en évitant l’incendie du château, et en croisant sur sa route un ange qui se nomme l’Amour:

Il faut que tu vives! Je suis la vie !

Le ciel est dans mes yeux!

Je marcherai à tes côtés

Je supporterai tes malheurs avec toi.

Souris et espère! Je suis l’Amour!

Ce qui m'entoure n'est-il que sang et boue?

Je suis le divin! Je suis l’oubli!

Je suis le dieu qui vient du paradis sur terre

pour faire de la terre un paradis.

357Re://T7190 [Casio/Dora/Opera/Ludv/Opus - Andrea Chénier] post. 18-07-14 19:23:52

J’ai longtemps pensé qu’Andrea Chénier était un opéra de second ordre, qui devait beaucoup aux interprètes qui ont immortalisé ses principaux airs. Franco Corelli nous a laissé un incomparable Come un bel di di maggio, que chante le poète sur un vrai poème d’André Chénier au quatrième acte, et José Carreras est sublime dans l’air du début de l’opéra: Un di all’azzuro spazio. Or c’est à la lumière de cet extrait, qui a servi de rampe de lancement à plusieurs grands ténors (Domingo, del Monaco, et aujourd’hui Jonas Kaufmann qui en fait une de ses meilleures prises de guerre avec Otello) que j’ai  révisé mon jugement sur cet opéra: il est d’une écriture magnifique, du début à la fin. L’œuvre s’accorde dans un ensemble d’une très grande solidité, jamais éprouvée par les nombreuses digressions dont l’histoire s’accapare (un double récit politique et amoureux). Un opéra incontournable de la période du vérisme, qui échappe à ses pièges, et qui réussit à rendre un amour passionné entre André Chénier et Madeleine de Coigny alors que tout les divise au commencement.

357Re://T7190 [Casio/Dora/Opera/Ludv/Opus - Andrea Chénier] post. 18-07-14 19:26:49

La scène finale est extraordinaire. Le cri d’amour des deux amants (Vive la mort, ensemble!) qui se dirigent vers la guillotine est une des fins les plus victorieuses, musicalement et théâtralement, et des plus intérieurement heureuses qu’on ait vue à l’opéra. Aussi, d’un point de vue psychologique, cela laisse présager le mysticisme exalté des Carmélites de Poulenc.

357Re://T7190 [Casio/Dora/Opera/Ludv/Opus - Andrea Chénier] post. 18-07-14 19:29:12

Ce grand air au début de l’opéra, appelé «Improvisation», est une mise en abîme de l’écriture même de tout l’opéra. Giordano y place ses principaux motifs amoureux, mais un fait unique surprend dans la partition: elle est sans armure du début à la fin, comme si cette écriture procédait elle-même d’une improvisation. Pourtant, nous sommes en territoire tonal, et très rarement en do majeur, seule tonalité qui dispense la portée d’une déclinaison de dièses ou de bémols. L’œuvre n’obéit pas, non plus, à aucune tonalité de prédilection. Elle commence en la, finit en sol, et fait état, comme toutes les œuvres véristes, d’innombrables modulations. J’ai longtemps cherché à savoir pourquoi Giordano a choisi ce parti pris pour le moins laborieux, et la réponse ne m’est jamais venue. Son opéra le plus prisé après Andrea Chénier, Fedora, est écrit de façon plus conventionnelle théoriquement, bien que dans toutes les œuvres de Giordano nous assistons à des audaces mélodiques qui confinent à l’étrange: ici, par exemple, la dernière note de la gavotte qui conclut le premier acte surprend par son absence de tonique. Mais j’interprète cet accord en si mineur (au lieu du ré majeur attendu) comme un débouchement sur le drame: ces amusements de la bourgeoisie tirent à leur fin.

357Re://T7190 [Casio/Dora/Opera/Ludv/Opus - Andrea Chénier] post. 18-07-14 19:31:50

Au plan des comparaisons, je trouve que cet opéra sur trame historique a beaucoup de points communs avec Tosca de Puccini. Dans les deux cas les ténors sont mis en valeur par deux grands airs, un sur l’amour dès leur entrée en scène à l'acte I, et un adieu à la vie dans leur prison juste avant leur exécution. Il y a, au centre, une aria pour la soprano qui exprime des sentiments de piété par rapport à sa destinée. Et puis il y a ce triangle amoureux à saveur politique dans un climat social divisé.

 

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Auguste Couder - Ouverture des États Généraux de la Révolution, 5 mai 1789

ANDREA CHÉNIER

 

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Madeleine de Coigny raconte la mort de sa mère: celle-ci, d’abord présentée au premier acte comme une rombière qui donne des soirées décadentes, se trouve à sauver la vie de sa fille: Madeleine peut s’enfuir, en évitant l’incendie du château, et en croisant sur sa route un ange qui se nomme l’Amour:

Il faut que tu vives! Je suis la vie !

Le ciel est dans mes yeux!

Je marcherai à tes côtés

Je supporterai tes malheurs avec toi.

Souris et espère! Je suis l’Amour!

Ce qui m'entoure n'est-il que sang et boue?

Je suis le divin! Je suis l’oubli!

Je suis le dieu qui vient du paradis sur terre

pour faire de la terre un paradis.

357Re://T7190 [Casio/Dora/Opera/Ludv/Opus - Andrea Chénier] post. 18-07-14 19:23:52

J’ai longtemps pensé qu’Andrea Chénier était un opéra de second ordre, qui devait beaucoup aux interprètes qui ont immortalisé ses principaux airs. Franco Corelli nous a laissé un incomparable Come un bel di di maggio, que chante le poète sur un vrai poème d’André Chénier au quatrième acte, et José Carreras est sublime dans l’air du début de l’opéra: Un di all’azzuro spazio. Or c’est à la lumière de cet extrait, qui a servi de rampe de lancement à plusieurs grands ténors (Domingo, del Monaco, et aujourd’hui Jonas Kaufmann qui en fait une de ses meilleures prises de guerre avec Otello) que j’ai  révisé mon jugement sur cet opéra: il est d’une écriture magnifique, du début à la fin. L’œuvre s’accorde dans un ensemble d’une très grande solidité, jamais éprouvée par les nombreuses digressions dont l’histoire s’accapare (un double récit politique et amoureux). Un opéra incontournable de la période du vérisme, qui échappe à ses pièges, et qui réussit à rendre un amour passionné entre André Chénier et Madeleine de Coigny alors que tout les divise au commencement.

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La scène finale est extraordinaire. Le cri d’amour des deux amants (Vive la mort, ensemble!) qui se dirigent vers la guillotine est une des fins les plus victorieuses, musicalement et théâtralement, et des plus intérieurement heureuses qu’on ait vue à l’opéra. Aussi, d’un point de vue psychologique, cela laisse présager le mysticisme exalté des Carmélites de Poulenc.

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Ce grand air au début de l’opéra, appelé «Improvisation», est une mise en abîme de l’écriture même de tout l’opéra. Giordano y place ses principaux motifs amoureux, mais un fait unique surprend dans la partition: elle est sans armure du début à la fin, comme si cette écriture procédait elle-même d’une improvisation. Pourtant, nous sommes en territoire tonal, et très rarement en do majeur, seule tonalité qui dispense la portée d’une déclinaison de dièses ou de bémols. L’œuvre n’obéit pas, non plus, à aucune tonalité de prédilection. Elle commence en la, finit en sol, et fait état, comme toutes les œuvres véristes, d’innombrables modulations. J’ai longtemps cherché à savoir pourquoi Giordano a choisi ce parti pris pour le moins laborieux, et la réponse ne m’est jamais venue. Son opéra le plus prisé après Andrea Chénier, Fedora, est écrit de façon plus conventionnelle théoriquement, bien que dans toutes les œuvres de Giordano nous assistons à des audaces mélodiques qui confinent à l’étrange: ici, par exemple, la dernière note de la gavotte qui conclut le premier acte surprend par son absence de tonique. Mais j’interprète cet accord en si mineur (au lieu du ré majeur attendu) comme un débouchement sur le drame: ces amusements de la bourgeoisie tirent à leur fin.

357Re://T7190 [Casio/Dora/Opera/Ludv/Opus - Andrea Chénier] post. 18-07-14 19:31:50

Au plan des comparaisons, je trouve que cet opéra sur trame historique a beaucoup de points communs avec Tosca de Puccini. Dans les deux cas les ténors sont mis en valeur par deux grands airs, un sur l’amour dès leur entrée en scène à l'acte I, et un adieu à la vie dans leur prison juste avant leur exécution. Il y a, au centre, une aria pour la soprano qui exprime des sentiments de piété par rapport à sa destinée. Et puis il y a ce triangle amoureux à saveur politique dans un climat social divisé.

 

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